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Volcan Nyiragongo (RDC) : qu’est-ce que le scénario redouté de « l’éruption limnique » ?

Les coulées de lave ont déjà provoqué la mort de dizaines de personnes, et détruit les habitations de centaines d’autres, à Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC). Mais l’éruption du volcan Nyiragongo, intervenue samedi, pourrait prendre des proportions encore plus importantes les jours à venir, craignent les autorités.  

« Les données actuelles de la sismicité et de la déformation du sol indiquent la présence de magma sous la zone urbaine de Goma, avec une extension sous le lac Kivu » qui borde la ville, a déclaré, dans une adresse à la population sur les médias locaux, le gouverneur militaire de la province du Nord-Kivu, le général Constant Ndima. « Des risques supplémentaires sont liés à l’interaction entre la lave et l’eau » du lac, a précisé ce dernier, justifiant son ordre d’évacuation « immédiat » et « obligatoire » de dix des dix-huit quartiers de la ville. 

Dès mardi, l’Observatoire de volcanologie de Goma (OVG), référent des autorités locales sur tout ce qui touche au Nyiragongo, avait évoqué plus en détail cette hypothèse d’éruption dite « limnique », dans une note technique dont l’AFP a eu copie, et authentifiée par des sources indépendantes. « Eruption du Nyiragongo, ouverture des fractures du flanc sud, les coulées de lave détruisent une partie des villes de Goma et Gisenyi ; au même moment une éruption fissurale ou phréato-magmatique se produit sous le lac et/ou un grand séisme de magnitude 6,5 ou 7 se produit dans le lac », note ce document. 

En conséquence, « une éruption limnique se produit et les gaz dissous dans les eaux profondes du lac montent (à la surface), surtout le CO2, asphyxient tous les être vivants autour du lac Kivu du côté congolais et rwandais », provoquant la mort de milliers de personnes. Le pire scénario. 

Deux autres scénarios

Le volcan Nyiragongo est entré en éruption soudaine samedi soir, provoquant un premier exil des habitants, revenus depuis lors mais qui vivent toujours dans la psychose d’une nouvelle éruption du fait des incessants et puissants séismes continuant de secouer la région. La lave s’est écoulée en deux directions depuis les flancs du volcan, une coulée s’immobilisant dans les faubourgs nord-est de Goma, l’autre coupant sur un kilomètre la route nationale 4 en périphérie nord de la ville. 

Les autorités locales ont également formulé deux autres hypothèses sur une possible poursuite de l’éruption. Le premier : « Éruption du Nyiragongo sur son flanc sud, ouverture des fractures jusque dans les villes de Goma et Gisenyi (au Rwanda voisin), la lave coule à partir des fractures et détruit une partie de ces villes. »  

Le deuxième, pas beaucoup plus rassurante : « Éruption du Nyiragongo sur son flanc sud, ouverture des fractures du flanc jusqu’au lac en traversant les villes », poursuit le document. « Une quantité de lave détruit une partie des villes de Goma et Gisenyi, et atteint le lac. Comme la quantité de lave qui se déverserait dans le lac n’est pas suffisante pour augmenter la température des eaux profondes sur tout le lac d’au moins 1°C, il n’y aura pas d’éruption limnique ». 

Une équipe d’experts vulcanologues sur place

Une équipe d’experts vulcanologues est arrivée sur place « pour observer et prélever les données actuelles, lesquelles vont permettre au gouvernement de prendre des décisions futures », a également déclaré, ce jeudi le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya. « Depuis ce matin, la fréquence et l’intensité des tremblements de terre ont baissé, les mouvements sismiques oscillent autour de 4,2 de magnitude, alors que la plus puissante observée ces quatre derniers jours a atteint 5,2 », a-t-il indiqué, évoquant au total quatre risques dans les heures et jours à venir, certains reprenant ceux mentionnés par les autorités locales. 

Le premier est « celui d’accentuation des tremblements de terre ressentis de manière continue depuis l’éruption du 22 mai », près de 400 au total, et « qui peuvent causer des pertes en vie humaines et dégâts matériels importants », a-t-il souligné. Un autre risque est celui « d’une éruption volcanique secondaire, partant des fissures créées par les mouvements sismiques ». « On ne sait pas si toute la lave s’est déjà vidée ou si elle cherche à ressortir. Et si par malheur cette lave rencontrée une fissure, cela créerait une éruption secondaire », a ajouté Patrick Muyaya. 

Il y a aussi le « risque d’explosion d’une poche de gaz sous le lac, du fait d’un contact avec le magma ». « Le lac Kivu contient beaucoup de gaz méthane, et toute cette activité sismique peut avoir un impact, et ce serait le scénario catastrophe », a-t-il reconnu, suggérant ainsi une éruption « limnique ». Enfin, le quatrième risque est la « toxicité dans l’environnement ambiant du fait de la poussière, des cendres émises dans l’atmosphère par le volcan », a-t-il conclu. 

La précédente éruption majeure du Nyiragongo, le 17 janvier 2002, avait fait une centaine de morts. L’éruption la plus meurtrière de ce même cratère remonte à 1977. Plus 600 personnes avaient alors perdu la vie. 

Source : L’Express

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